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Au 26 mars, 840 cas d’infection au nouveau coronavirus ont été enregistrés en Russie, 38 personnes en ont guéri et 2 autres y ont succombé. À Moscou, le nombre des patients est de 546.
Je suis partie faire du ski dans les Alpes et suis rentrée en Russie le 8 mars 2020. Le soir même, ma température est montée à 37,6 et j’ai appelé le médecin. Il est venu faire un prélèvement, puis est revenu faire de même le lendemain – c’est la procédure requise. Le jour suivant, on m’a appelée pour me dire que les résultats d’analyses « ne leur avaient pas plu » et qu’une ambulance viendrait me transporter à l’hôpital. Ils ont vérifié si des enfants non majeurs habitaient avec moi – j’ai deux fils de 11 et 17 ans. En gros, ils sont venus chercher aussi bien eux que moi.
À mon arrivée, j’ai passé beaucoup d’analyses et des antibiotiques m’ont immédiatement été prescrits, quant aux enfants, ils ont commencé à les gaver de médicaments antiviraux. Les résultats d’analyses n’ont pas été communiqués. La nourriture était normale, on la mettait dans un compartiment du côté du couloir, je la récupérais. Sinon, aucun contact avec le monde extérieur – les médecins portent des combinaisons et c’est interdit de quitter la chambre.
Ce n’est qu’au 8e jour après la prise des analyses que j’ai appris que moi-même et mes enfants étions atteints du coronavirus.
Le fait que les enfants étaient également malades m’a surprise. À la maison je m’efforçais de respecter des mesures de précaution – j’avais une serviette propre à moi, ma tasse, ma cuillère, mon assiette. Je ne quittais ma chambre qu’avec un masque. Je me lavais les mains toutes les secondes et nettoyais tout ce que je touchais avec de l’alcool. Mais ils l’ont attrapé quand même. Donc, on nous a prescrit des antibiotiques et des perfusions.
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Dès le début, j’ai demandé de me séparer de mes enfants, donc on est placés dans le même hôpital, mais dans des box différents. Les enfants n’ont toujours affiché aucun symptôme. On communique entre nous par téléphone.
Le jour le plus dur est le dimanche. Cette journée est encore plus calme que les autres. Après le petit-déjeuner tu te demandes par quoi occuper ton temps avant le déjeuner.
Une fois que mon état de santé s’est amélioré, j’ai commencé à faire des exercices. Pour commencer, une gymnastique respiratoire. Pour le moment je n’ai rien compris, mais je répète ce que montrent les vidéos d’entraînement sur YouTube. Du côté intellectuel – livres et films. J’ai finalement pu voir Parasite.
Au bout de quelques jours passés à l’hôpital, le médecin m’a expliqué qu’un laboratoire de test au coronavirus y avait été lancé. Auparavant les analyses étaient envoyées à Novossibirsk, si bien qu’il fallait mettre du temps pour obtenir des résultats.
Ce n’est pas de moi-même que j’ai pitié, mais des médecins et des infirmières. Les costumes ne sont pas commodes, les masques sont désinfectés au chlore, si bien qu’ils irritent leurs yeux.
C’est ma troisième semaine à l’hôpital. On a guéri, mais pour qu’on puisse sortir il faut que deux tests soient négatifs. Donc on attend.
Avec mon épouse, on est rentré le 10 mars de Barcelone. Aucun contrôle n’a eu lieu à notre arrivée, personne n’a vérifié notre température. Nous avons passé la douane et quitté l’aéroport.
Déjà le 13 mars, ma température est montée à 38,3, le rhume a commencé. J’ai tout de suite appelée la ligne rouge mise en place par l’agence sanitaire Rospotrebnadzor, puis une ambulance. J’ai passé des analyses et le 15 mars on m’a annoncé que j’avais été testé positif. Le jour même on m’a hospitalisé. Cela étant dit, mon épouse a été testée négative, elle a passé toute cette période confinée à la maison et ce n’est que depuis hier qu’elle peut sortir.
La première semaine, je n’ai pratiquement pas été traité – je mangeais, dormais, regardais la télé et discutait via Skype avec mon professeur d’anglais. Le 22 mars, on m’a apporté de la ribavirine – le plus souvent il est utilisé contre l’hépatite C. Cependant, la dose dépassait cinq fois la norme – dix comprimés au lieu de deux. L’infirmière a été elle-même surprise par la dose, elle est allée voir le médecin pour vérifier, mais il lui a confirmé qu’il n’y avait pas d’erreur.
Les personnes hospitalisées ont leur propre chat sur messagerie où ils discutent des problèmes – à ce jour, nous y sommes 90. Les patients se plaignent qu’en raison des comprimés ils ont mal au dos, se sentent fatigués et ont le syndrome des yeux secs. En outre, après ce traitement, il faut éviter le sexe non protégé, et nous, justement, on planifiait une grossesse.
Sur fond de tout ceci, j’ai décidé de ne pas prendre ces médicaments. Lundi, mon médecin est venu me confirmer que mon état s’était amélioré et que je pouvais ne pas prendre le médicament. Il m’a proposé une alternative – l’arbidol. Je n’en ai toujours pas pris car je considère que j’ai déjà guéri. Je considère que mon corps a surmonté le virus et qu’il ne faut pas interférer.
Le 24 mars j’ai passé encore un test, s’il s’avère négatif j’en passerai encore un le 29 mars. Après deux tests négatifs je sortirai de l’hôpital. J’espère retrouver bientôt ma femme.
Je suis des cours d’amélioration de la qualification professionnelle à l’étranger, donc dans ce but j’ai beaucoup voyagé en Europe. Certes, je m’inquiétais face au risque d’y attraper quelque chose. Pendant la tenue de la Berlinale, chaque toux ou éternuement semait la terreur parmi les personnes présentes. Finalement, on est partis à Londres. Sur l’île, on se sentait plus à l’aise : la vie bouillait en ville – pubs, comédies musicales, pas de masques – que du gel antiseptique.
Mais vers la fin du séjour on nous a annoncé que la formation avait été suspendue et qu’il fallait rentrer. C’est là qu’a commencé le plan Épervier : j’achetais des billets, mais les vols étaient annulés. À un moment donné, j’ai réalisé que je ne parvenais pas à surmonter le stress. À bord du vol de correspondance à destination d’Helsinki j’ai eu de la fièvre, mais j’ai cru que c’étaient les nerfs qui en étaient à l’origine.
Je me suis retrouvée à l’aéroport Cheremetievo de Moscou le 17 mars. Dans l’avion, on a vérifié la température de tous les passagers – la mienne avait entretemps baissé – puis on nous a envoyés remplir les formulaires. De toute évidence, le personnel vêtu d’uniforme s’ennuyait. Je leur ai demandé de me faire passer un test. Une fois les prélèvements effectués, j’ai été placée en quarantaine à domicile.
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Je suis restée confinée chez moi jusqu’au 22 mars. Avec du temps, des symptômes d’une infection respiratoire sont apparus, mais pas plus. Le soir une ambulance est venue me chercher, m’informant que j’avais été testée positive. À mon arrivée à l’hôpital, j’ai repassé les tests.
La nuit, ma température est montrée jusqu’à 38,4 degrés. J’ai toussé fort et beaucoup, jusqu’aux spasmes dans la mâchoire. Je ne pouvais pas dormir et examinais sans cesse ma salive pour voir s’il y avait du sang. J’avais l’impression que ma gorge s’était transformée en un morceau de viande.
À un moment donné, je n’ai pas pu supporter et ai pressé le bouton rouge pour appeler le personnel. Des jeunes de bonne humeur ont décidé de me faire une perfusion, mais l’aiguille me faisait mal et j’avais l’impression que j’allais m’évanouir. Alors, j’ai éclaté en sanglots, leur expliquant que je ne voulais plus rien.
Le matin ils sont revenus pour mesurer ma température. Le mercure était retombé à 37,6°C. J’ai passé la journée à m’endormir et à me réveiller. L’expectoration s’est intensifiée.
Du coup, des problèmes de digestion ont commencé, si bien que j’ai dû renoncer au repas. Le soir, maman m’a envoyé des bananes et des mandarines ainsi que du chocolat – j’en ai toujours envie quand je suis malade.
Le 23 mars, on m’a annoncé qu’outre le coronavirus, je souffrais de pneumonie. Le soir, on a commencé à me donner des antibiotiques. Les médecins et infirmières ont alors commencé à m’accorder beaucoup d’attention – ils viennent souvent, ont mis à ma disposition le réseau Wi-Fi, et ont promis de trouver une solution à la température dans la chambre – elle est étouffante.
Aujourd’hui, le 24 mars, on m’a mis une deuxième perfusion à 6h00. Je tousse moins.
Ma température a baissé à 37°, mais je ressens une faiblesse indescriptible. J’ai tout le temps envie de dormir et j’ai du mal à rester assise. L’appétit a disparu. Le médecin dit que j’ai une intoxication en raison de la fièvre.
Je ne mange ni de viande, ni de produits laitiers, mais ici on m’apporte du lait. On me laisse tout simplement sur la table de la nourriture qui ne me convient pas. Ils m’ont expliqué sans équivoque qu’ils n’allaient pas prendre en compte mes préférences gastronomiques. Heureusement, mes proches m’ont envoyé des fruits, c’est donc plus facile maintenant. Mais les mets à base des légumes sont délicieux.
À vrai dire, pour le moment je n’ai pas la force de regarder des films, ni de lire. On me fait trois perfusions par jour. Dès que je me sens mieux, j’espère suivre des cours en ligne – mes camarades ont commencé à étudier, je ne veux pas rater les cours.
Le 1er mars 2020, Rospotrebnadzor a confirmé le premier cas de contamination SARS-CoV-2 enregistré à Moscou. Le patient David Berov venait de rentrer d’Italie. Voici ce qu’il écrivait au sujet de la situation :
« J’ai été placé dans une chambre collective de l’hôpital d’infectiologie de Moscou numéro un. Il y avait beaucoup de gens. Auparavant je n’avais été en contact qu’avec quelques membres de ma famille. À ce jour, ils sont tous confinés dans des hôpitaux. Ils n’ont et n’ont eu aucun symptôme de la maladie. Leurs premières analyses avaient donné un résultat négatif.
Comment on est placé en quarantaine ? Cela suscite beaucoup de questions. D’abord, on a appelé mes proches pour leur dire que les prélèvements seraient effectués à la maison. Sur place, on leur disait que j’avais été testé positif (alors qu’à l’époque ce n’était pas confirmé), on les forçait avec l’appui de la police à aller à l’hôpital d’infectiologie et les y enfermait », raconte-t-il sur Instagram.
Le 5 mars, le coronavirus a été confirmé chez ce jeune homme.
« Il n’était pas dans le sang, il a été trouvé dans ma salive. Comme on me l’a expliqué, il n’était pas bien visible, c’est pour cette raison que cela a pris du temps. Le traitement est prescrit en fonction des symptômes. Dans mon cas, c’est une toux légère – le reste va bien. Je n’ai plus de fièvre depuis longtemps. L’état général est normal », a-t-il écrit.
Sortie de l’hôpital le 7 mars, Berov a accordé un entretien aux journalistes de Lenta.ru, dans lequel il a évoqué l’attitude du personnel hospitalier à son égard.
« J’ai été très bien traité. Le personnel a fait preuve d’attention appropriée et de compassion. (...) Je pense que j’avais pris froid et rien d’autre. En principe, je ne comprends toujours pas de quoi j’étais malade. J’ai eu plusieurs tests négatifs ».
Toutefois, il considère qu’il faut tout de même rester prudent face à la Covid-19.
« Je ne peux pas et ne vais pas dire qu’il ne faut pas s’inquiéter en raison de ce virus. Mon histoire, ce n’est que mon histoire, mais il se peut qu’elle calme quelqu’un.
Dans mon cas, mon immunité a pris dessus sur l’infection. Mais je pense que nous ne sommes pas les vrais maîtres de notre corps : autours de nous il y a tant de virus et de microorganismes. Qui sait lesquels on rencontrera et quand et quelles seront les conséquences d’une telle rencontre », résume le jeune homme.
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