Trois œuvres de Maxime Gorki, le fondateur du réalisme socialiste dans la littérature russe

Max Alpert/Sputnik
Le roman La Mère de Maximе Gorki de 1906 est devenu un incontournable de la littérature soviétique et est souvent considéré comme la première œuvre du réalisme socialiste. Toutefois, cet écrivain est également célèbre pour ses autres travaux, dont nous vous présenterons les meilleurs dans cette publication.

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Né en 1868 dans l’Empire russe, un garçon nommé Alexeï Peсhkov a, plus tard, alors journaliste de vingt ans, pris le pseudonyme de Gorki (« Amer »). Il était actif politiquement et est devenu un symbole de l’idéalisme socialiste, même si ses relations avec les autorités soviétiques étaient difficiles. Parmi ses œuvres, figurent à la fois des romans, des pièces de théâtre et des autobiographies.

La Mère

C’est le roman le plus célèbre de l’écrivain, auquel il doit une grande partie de sa renommée. Son intrigue est basée sur des événements réels. L’action se déroule près de Nijni Novgorod, où Gorki est né. L’armée a dispersé la manifestation du 1er mai 1902 et ses leaders ont été emprisonnés. Le mécanicien révolutionnaire Piotr Zalomov, qui a également participé à cet événement, a inspiré Gorki pour créer le personnage de cette œuvre, Pavel Vlassov, et sa mère est devenue l’héroïne du roman.

Lénine l’a appelé « un livre très opportun », mais le traducteur anglais Hugh Aplin soutient que La Mère « ne concerne pas tant la politique » que le sacrifice chrétien de la mère elle-même. Bien que le roman soit devenu une icône du réalisme socialiste littéraire, il regorge de scènes de son époque, telles que le collage de tracts sur les clôtures de la ville, la lecture de livres historiques sur l’esclavage et les complots planifiés par des ouvriers autour du samovar (bouilloire traditionnelle russe). Il contient également de puissants souvenirs de la vie de l’usine, de la description méticuleuse du bâtiment lui-même à la cruauté et au cynisme de ses propriétaires.

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Les procédures judiciaires et les campagnes politiques sont retranscrites par la vision introspective de la mère ; sa transformation émotionnelle, d’une confusion effrayante à une confiance aveuglante, est un thème central. Son fils lui dit très tôt : « Ceux qui nous donnent des ordres exploitent notre peur ». Vers la fin, lorsque la mère de Pavel écoute envoûtée son discours culminant dans la salle d’audience, elle voit comment les yeux avides des juges « contaminent son corps souple et fort avec leurs regards, enviant sa santé, sa force, sa fraîcheur », en ressentant « l’étrange pouvoir addictif de sa foi ».

Les Enfants du soleil

Gorki a publié cette pièce étonnamment moderne sur la science et la société pendant les bouleversements révolutionnaires de 1905, un an avant La Mère. Il a écrit Les Enfants du soleil en prison pour avoir protesté contre l’autorité du tsar.

La pièce raconte l’histoire d’une famille de l’intelligentsia dans une période de changement social rapide. Le chimiste Pavel Protasov est loin de la vie réelle et du peuple. Il ne pense qu’à ses expériences, croyant que la science rendra l’existence des gens idéale à l’avenir. Cependant, alors que les flacons bouillonnent dans son laboratoire, des changements majeurs se préparent dans le chaos effréné du début du XXe siècle. Les travailleurs se révoltent, tandis que la classe moyenne, fidèle au gouvernement et narcissique, n’a que vaguement conscience qu’une nouvelle expérience sociale est sur le point de commencer.

Staline et Gorki

Enfance

À l’époque soviétique, la ville de Nijni Novgorod, où est né Alexeï Peсhkov, s’appelait « Gorki » en l’honneur du pseudonyme du futur écrivain. Pas étonnant que le traducteur britannique des classiques russes Ronald Wilks considérait cet auteur comme « la figure centrale de la littérature russe du XXe siècle ». Alors que les œuvres de Gorki, qui avaient du succès en URSS, se sont peu à peu démodées, les livres interdits de son vivant ont été redécouverts et glorifiés à juste titre. Aujourd’hui, alors que son autorité se rétrécit dans les recoins poussiéreux de l’histoire, il semble ironique que la réputation de Gorki ait été autrefois inébranlable. Néanmoins, les mémoires perçantes de l’écrivain, dont la première partie s’intitule Enfance, prouvent qu’il mérite toujours d’être lu. Il les a écrites en 1913, rentrant chez lui en Russie après de nombreuses années d’exil sur l’île de Capri.

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Les mémoires commencent par une description des funérailles du père de l’écrivain : « Le regard joyeux de ses yeux clairs s’est éteint ; le visage si bon d’ordinaire apparaît morne et la saillie de ses dents entre les mâchoires distendues emplit mon cœur d’un vague effroi », a écrit Gorki. 

Gorki, avec sa simplicité habituelle, capte les sentiments d’un enfant essayant de se cacher derrière sa grand-mère et s’inquiétant des grenouilles qui sont enterrées vivantes avec son père. Des détails séparés – des bouvreuils dans la neige ou jeu de guitare à la lueur de bougie – illuminent les moments de bonheur dans cette mosaïque de la vie russe : variole, tempêtes, gorgées de vodka… Ce sont les détails « cauchemardesques » qui réveillent la peur et l’incompréhension du jeune garçon. Son grand-père, qui transportait autrefois des barges sur la Volga, le bat jusqu’à ce qu’il perde connaissance. « Durant les interminables journées de travail, la douleur elle-même est une fête, et l’incendie un divertissement, comme sur un visage insignifiant toute égratignure est un ornement »

Son enfance, pleine de violence, est souvent douloureuse à rappeler, mais « la vérité est au-dessus de la pitié », et après tout, il « ne parle pas de lui-même, mais du cercle fermé et étouffant d’impressions terribles dans lequel un simple Russe a vécu et vit à ce jour ».

Malgré ses moments sombres, l’autobiographie de Gorki est rédemptrice, reflétant son optimisme politique. « Ce n’est pas seulement parce que la couche de boue bestiale est si grasse et si fertile chez nous que notre vie est singulière, mais parce que des choses pures, saines et fécondes arrivent à se frayer victorieusement une voie à travers ces obstacles. Malgré tout, les sentiments généreux se développent et voici que naît un inébranlable espoir en notre avènement à une vie lumineuse et humaine ».

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Les droits sur cet article, initialement publié en 2016, sont la stricte propriété du journal Rossiyskaya Gazeta.

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