Parler du goulag est inconcevable sans mentionner Soljenitsyne - en fait, il a été le premier en URSS à évoquer ce sujet. La publication risquée de sa nouvelle Une journée d'Ivan Denissovitch dans le magazine Nouveau monde en 1962 a constitué une véritable coup de tonnerre de la société. Auparavant, le thème des camps staliniens n’était pas abordé, et ce même alors qu’il touchait de nombreuses familles.
Dans Une Journée d'Ivan Denissovitch, le héros, un paysan, se rappelle comment il a combattu les Allemands, a été capturé par ces derniers, s’est enfui et a été immédiatement envoyé en camp côté soviétique. Le gouvernement stalinien agissait ainsi avec toutes les personnes capturées par les nazis, les considérant comme des espions ou des déserteurs. L'histoire décrit également le terrible quotidien de la vie dans le camp.
Ceux qui veulent se faire une idée plus large de l’ampleur des camps staliniens peuvent découvrir le travail grandiose de Soljenitsyne L’Archipel du goulag, qu’il a lui-même qualifié d’« expérience de recherche artistique ».
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Chalamov a anticipé l'apparition d'un grand nombre de mémoires et de récits à la première personne sur cette terrible période. Il estimait que la véracité était la principale force de la littérature du futur. Chalamov décrit dans un style sec et laconique, à travers les yeux d'un observateur sans concessions, l’insupportable travail des prisonniers, le terrible manque de nourriture, les passages à tabac et le froid glacial de la Kolyma. Derrière ces observations de la souffrance au quotidien, l'auteur livre ses réflexions sur l’homme et le sens de la vie. Son style pénètre profondément dans la conscience du lecteur, et ce document sur le goulag est peut-être plus terrible que toute œuvre d’art sur ce sujet.
« Le travail insupportable nous a causé des blessures irréparables, et toute notre vie durant la vieillesse sera faite de souffrances physiques et mentales sans fin et variées ».
Les voix des femmes qui ont connu l’horreur des camps étaient souvent peu audibles. Cependant, Kersnovskaïa a réussi à se faire entendre, et même voir : elle a adjoint à ses mémoires des dessins - simples, semblant peints par un enfant, mais de ce fait encore plus terrifiants.
Kersnovskaïa possédait une force incroyable, tant physique que spirituelle, et exigeait de faire le travail des hommes - elle a travaillé même à la mine. Son histoire est incroyable : elle a réussi à s'échapper et a survécu dans la taïga alors que sa seule nourriture était un morceau de viande de cheval congelé. Elle raconte sans fioritures les événements les plus terribles qui se passaient au goulag, la position de bas étage qu’y occupait la femme et ce que beaucoup d’entre elles ont entrepris pour survivre.
Le titre du livre reflète ses tentatives de comprendre dans quelles conditions une personne peut perdre son essence humaine.
Des expositions de dessins de Kersnovskaïa réalisés dans des camps sont organisées dans le monde entier.
Les écrivains modernes abordent également le sujet du goulag, et l'un des plus grands auteurs en prose, Zakhar Prilepine, a envoyé son héros dans le camp situé dans l'archipel des Solovki, le fameux archipel du goulag décrit par Soljenitsyne.
Ce volumineux roman est basé sur une étude approfondie des matériaux historiques. L'auteur s'est rendu à plusieurs reprises dans les Solovki, et y a fouillé dans les archives. Il décrit de manière extrêmement détaillée le chef du camp, ainsi que l’ensemble de la structure concentrationnaire - depuis les cellules réalisées dans d’anciennes cellules monastiques et les couchettes en bois jusqu’aux cellules punitives aménagées dans des cellules monastiques éloignés. Prilepine évoque également les différents groupes de prisonniers : au goulag, des criminels ordinaires purgeaient leur peine aux côtés des prisonniers politiques.
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Un autre roman contemporain et best-seller, premier ouvrage de l'écrivain Iakhina, a fait beaucoup parler de lui dans toute la Russie et a déjà été traduit en dix langues. Il ne parle pas du goulag au sens littéral, mais des répressions staliniennes – de la « dékoulakisation » et de la déportation des paysans tatares en Sibérie.
L'héroïne, accompagnée d'un groupe de prisonniers, se retrouve au milieu de la taïga sous l'escorte d'un officier. Ils doivent eux-mêmes creuser la terre, trouver de la nourriture et survivre au froid. Mais ironie de l’histoire, elle se sent plus libre dans de telles conditions qu’en subissant l'oppression de son mari et de sa belle-mère.
Au cœur du roman se trouve une histoire fictive. Cependant, Iakhina a étudié des documents d'archives sur les déportations en Sibérie à l'époque de Staline. En outre, sa grand-mère a été victime de la dékoulakisation dans les années 1930 et l'auteur s'est appuyée sur ses souvenirs dans ses descriptions de la vie quotidienne.
Découvrez en outre notre documentaire dédié aux Solovki
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